La justice de Dieu

Chaque fois que j’entends ce récit, je me réjouis d’avoir eu la chance de faire des études bibliques à l’université et d’avoir été mise en contact avec les auteurs les plus avancés en matière de recherche sur la Bible. C’est en partie grâce à ce privilège que la compréhension des textes s’ouvre et s’élargit, que les Écritures se déploient et se déchiffrent et nous parlent.

À première vue, ce texte est choquant. J’entends le murmure de la foule se disant que cette histoire est bien injuste. Que le maître ne comprend pas et que l’inégalité prime dans sa façon de mener sa vigne. Or, quelles sont les premières phrases du récit ? Il s’agit d’une parabole que Jésus raconte à ses disciples en commençant par « le royaume des cieux est comparable au maître d’un domaine… » On oublie ce détail important quand on se laisse prendre par cette histoire d’ouvriers en apparence traités injustement.

Le royaume est comparable au maître de la vigne.   Que fait donc ce

maître ? Il propose un salaire à des ouvriers pour une journée de travail. Or, au fil du jour, il y a des personnes qui demeurent à proximité et espèrent, en attendant être aussi choisies pour travailler à la vigne. Pourquoi n’ont-elles pas été appelées avant et pourquoi certaines seulement en fin de journée ? Pourquoi le maître les a-t-il tout de même conviées à travailler à sa vigne ?  

Plusieurs hypothèses peuvent se poser. Celle que j’ai étudiée est la suivante : le maître demande à ses ouvriers et ouvrières selon leurs capacités. Les personnes embauchées pour une demi-journée ou pour une heure ont aussi quelque chose à offrir : des personnes âgées, des personnes malades ou handicapées et enfin celles qui, pour toutes sortes de raisons physiques ou psychologiques, ne peuvent contribuer davantage. Le maître choisit de donner une chance à tout le monde.

À la fin de la journée, les ouvriers qui ont travaillé toute la journée jugent injuste le fait que le maître accorde le même salaire aux ouvriers qui n’ont travaillé qu’une partie de la journée.

Le maître questionne alors son droit de donner…  Le maître du royaume traite également chaque personne selon sa particularité, selon sa capacité. Voilà à quoi ressemble le règne de Dieu. Une place pour chacun et chacune. Un traitement juste au regard de Dieu.

La justice ou l’égalité de Dieu sont parfois bien différentes des nôtres. Voilà une réflexion à porter plus loin dans notre vie de tous les jours. 

Enfin, il est bien dommage que la richesse de cette parabole soit détournée par le dernier verset (probablement ajouté par l’auteur) au récit initial et qui enferme et limite le sens à la relative et douteuse importance d’être les premiers ou les derniers !

En guise de proposition pour creuser davantage cette question de justice sociale, je vous invite à consulter le site bandefm.org pour écouter une série de podcast (conférence audio) du bibliste, le père Michel Proulx, sur le prophète Amos identifié comme le défenseur du concept de la justice sociale.

Louise Blais, coordonnatrice des activités pastorales et paroissiales.