Habités par les qualités du Bon Pasteur (Jn 10, 1-10)

En 1700, un couple arrivait à l’hôpital pour l’accouchement d’un bébé qu’il attendait depuis 10 ans de mariage. Après 30 minutes d’observation, le médecin dit à l’époux : « Il est impossible de sauver la vie de ton épouse et le bébé à la fois. Soit l’enfant vit, la maman meurt ou la maman vit, l’enfant meurt ».

C’était une époque où la médecine n’était pas trop évoluée, l’hôpital n’avait pas tous les équipements pour faciliter les accouchements. L’époux était devant la condition inéluctable de choisir. Même son silence serait considéré comme un choix parce qu’il pouvait entrainer la mort des deux. Pour le droit civil, l’époux était confronté à la théorie du moindre mal, qui stipule : « Entre deux maux, il faut choisir le moindre ».

Imaginez-vous dans un tel drame, à la place de l’époux, que feriez-vous? Personnellement, j’aurais réfléchi 10 000 fois avant de prendre une décision. Mais l’enjeu c’est qu’il n’y a pas trop de temps pour réfléchir. La décision est hic et nunc, c’est ici et maintenant.  Après un temps de silence, la jeune épouse souffrante criait haut et fort : « Hello docteur, j’ai déjà vécu 33 ans, j’accepte de mourir pour que mon enfant ait la vie! C’est sur cette courageuse et triste déclaration que l’histoire a pris fin.

Je n’étais pas là en 1700 pour confirmer la véracité de cette histoire. La seule chose que je sache, de même que la mère a donné sa vie pour son enfant, c’est ainsi que Jésus, le Bon Berger a donné sa vie pour ses brebis. Par rapprochement, cette mère représente Jésus, le donneur de vie par excellence et le bébé, c’est toute la race humaine pour laquelle le Bon Pasteur est allé jusqu’au bout de l’amour pour nous sauver. En ce 4e dimanche de Pâques, communément appelé dimanche du Bon Pasteur où l’Église célèbre la Journée mondiale des vocations, nous allons réfléchir sur 3 points: le berger et le bon berger, l’image du Jésus bon pasteur dans les Évangiles et l’histoire de ma vocation.

 

  • Le berger et le bon berger

Dans l’évangile, Jésus prend distance par rapport aux bergers de son temps et s’auto-proclame bon berger. Il nous montre que les bergers pharisiens de son époque prenaient soin de leur troupeau, mais ils étaient limités à certains points. Pour Jésus, n’importe qui peut être berger, mais être le bon berger a un prix. Prenons l’exemple de la relation qui existe entre un canard et ses petits. C’est vrai que la cane protège ses petits, elle leur montre à nager, voler etc. Par ailleurs, quand la cane trouve à manger, elle oublie ses petits. C’est la même attitude retrouvée chez la dinde avec ses petits.  Alors que la poule, en plus de protéger ses poussins, quand elle trouve quelque chose, elle rassemble ses poussins pour les nourrir. Si la nourriture n’est pas suffisante, elle a tout donné à ses petits et elle est resté sans manger. La poule trouve sa joie en donnant sa vie pour ses petits tel Saint Maximilien Kolbe en 1941 a pris la mort à la place d’un père de famille qu’on allait torturer au camp de concentration à Auchwitz.

À l’imitation du Christ, Bon Berger, l’attitude de la poule nous interpelle à sortir du labyrinthe des chemins de la cane, à abandonner les comportements égoïstes de la dinde pour nous engager sur la voie nouvelle des chemins de fraternité et de don de nous-mêmes. C’est dans cette optique que le pape François disait : « Jésus est le seul berger qui nous parle, nous connaît, nous donne la vie éternelle et nous protège »[1]. Le bon berger nous rend attentifs pour accueillir et aimer chaque personne avec leur force et leur faiblesse. Il nous donne de l’empathie, la patience du pécheur pour accompagner les hommes et les femmes de notre temps ballotés dans leur quête de vérité, de sens, de bonheur, de désirs, des espoirs ainsi que de les accompagner dans leurs échecs et déceptions de la vie. De par notre baptême, les qualités du Christ, Bon Berger sont imprimées dans chacun de nous pour prendre soin des autres. Aux jeunes ici présents, vos parents aimeraient voir en vous l’image du bon berger responsable qui prendra soin des autres enfants, qui prendra soin d’eux dans leur vieillesse, qui transmet les valeurs familiales et spirituelles, de sorte qu’ils prennent place avec maturité dans la société. L’équipe pastorale souhaite voir des paroissiens désireux de faire du bénévolat, des couples qui s’engagent pour une Église toujours renouvelée.

2- L’image du Jésus, Bon Pasteur dans les Évangiles

Je vous présenterai ces images parce que vous avez eu des pasteurs différents par leur caractère ou approche pastorale. Et vous en aurez toujours. En dépit de leur différence, ils sont tous habités par la compassion de Dieu pour accompagner l’humanité et le désir de servir Dieu dans les personnes. L’image du Bon Pasteur chez Matthieu est une personne inculturée, qui parle le langage des gens. C’est un Jésus roi, qui incarne une présence d’autorité. Il crée des liens, des moments de festivité, de rencontres avec les gens.

Le Bon Pasteur chez saint Marc, c’est un Jésus occupé, il est toujours pressé par le temps et il n’a pas d’endroit pour reposer sa tête. C’est un missionnaire, une personne d’équipe qui encourage, identifie les talents pour faire avancer la communauté. L’image du Bon Pasteur chez Marc, c’est une personne d’initiative.

Le Bon Pasteur chez Luc est un docteur des malades, il panse les blessures des personnes rencontrées. Une personne priante, patiente, disponible à écouter avec cœur et donne une parole d’espérance pour consoler les cœurs attristés et les personnes découragées de la vie.

L’image du bon Pasteur chez saint Jean l’Évangéliste, c’est un Jésus que l’on ne comprend pas, il est détaché de ce monde, il n’a ni père ni mère. Personne ne sait d’où il vient. Il habite les hauteurs spirituelles. La figure de ce pasteur nous invite à l’adoration, à la lectio divina et à la contemplation de Dieu. Au fait, c’est dans la différence d’attitude de ces pasteurs que j’ai rencontré le Christ en vue du sacerdoce ministériel.

  • L’histoire de ma vocation

Je suis né d’une famille catholique de 36 enfants (frères, sœurs, neveux et nièces). J’ai appris la foi de ma mère. J’ai fait le catéchisme à l’église locale et à mon école primaire. Ma mère m’a tout appris et elle a eu un impact majeur sur ma vocation sacerdotale.  Ma mère est une catholique dévouée qui, chaque jour, me pose question sur ma relation avec le Christ. Elle m’a appris à prier, à réciter le chapelet, à dire le Notre Père et à lire la Bible matin et soir.  Je suis éternellement reconnaissant d’avoir grandi dans une famille unie, solidaire et spirituelle (une famille qui a aussi ses faiblesses). Dès mon entrée au séminaire, ma famille a soutenu ma vocation par ses prières et ses encouragements constants. Ma mère me disait toujours : « Fritz, réponds joyeusement à ta vocation, ma prière te soutiendra ». Pendant mes 40 ans d’existence, d’Haïti à Brooklyn/ New York, de Montréal à Saint-Jean-Sur-Richelieu, je n’ai jamais trouvé une raison de regret d’être chrétien catholique. J’espère que c’est pareil pour vous! Enfin, de même que Jésus, le Bon Pasteur a donné sa vie pour ses brebis, ma maman a alimenté ma vocation sacerdotale.

En cette Journée mondiale des vocations, confions à la Vierge Marie la mission de tous les pasteurs, les religieuses à la vie consacrée, les familles, les jeunes, les enfants, les bénévoles exécutant une tâche dans l’Église et prions pour que Jésus continue d’interpeller des hommes et des femmes de notre temps à vivre pleinement la vocation à laquelle ils sont appelés à servir Dieu dans l’humain. Amen!

Fritznel Mertyl, 30 avril 2023

[1] Pape François, Angélus, Place Saint-Pierre, Dimanche 12 mai 2019.