Augmentez notre foi !! (Lc 17, 5-10)

1-Il y a l`histoire de la prière de la graine de moutarde, qui est l’inspiration d’un petit garçon abandonné par sa mère et qui demandait une seule chose à Dieu, « la foi ». Il vivait dans une condition d’extrême pauvreté avec sa grand-mère (pas d’électricité, eau traitée, ni les besoins de premières nécessités). Dans sa prière, il ne demandait ni nourriture, ni argent, ni de jouets pour se divertir, ni la richesse. Au contraire, il s’agenouillait humblement et demandait à Dieu la foi. Les raisons pour lesquelles la maman abandonna son enfant nous sont inconnues. Peut-être cet abandon n’est pas volontaire. Peut-être la maman a eu un problème psychologique. Il se peut qu`elle soit dépassée par les circonstances de la vie. L`unique chose que nous savons, c`est que l’enfant demandait à Dieu la foi pour accepter cette réalité existentielle qu’il ne peut pas changer. Car la foi est une puissance extraordinaire qui nous accompagne dans l`aujourd`hui de notre vie.

2- En racontant l’histoire de cet enfant, je pense à mes grands-parents (20 ans de cela) qui disaient toujours : « Si seulement les gens avaient plus de foi, ils n’auraient pas autant de questions ou de doutes. S’ils avaient juste plus de foi, Dieu répondrait à leurs prières. S’ils avaient plus de foi, ils seraient plus impliqués à l’église, ils seraient de meilleurs parents/grands-parents, meilleurs époux, la vie serait différente. Et j’ai le pressentiment que beaucoup d’entre nous ont lutté contre cela à un moment donné dans la vie.

3- Je me permets de vous dire que cette conception de la foi, qui est similaire à celle des apôtres, a évolué. Et c’est exactement cette attitude que les apôtres ont adoptée dans l’évangile du 27e dimanche du temps ordinaire. « Augmentez notre foi », demandent-ils à Jésus.  Jésus leur dit : « Si vous aviez la foi de la taille d’une graine de moutarde », dit-il, « vous pourriez dire à cet arbre : « Déracine-toi et plante-toi dans la mer », et il t’obéirait. »  Les apôtres avaient une foi limitée, une foi non éclairée. Mais saint Paul, dans la deuxième lecture, dit à Timothée : « N’aie pas honte d’annoncer l’Évangile. » C’est pourquoi au XIe siècle saint Anselme de Cantorbéry parlait de l’intelligence de la foi (fides quaerens intellectum). Une foi qui cherche à comprendre parce qu’elle est expérimentée dans un monde qui demande nos raisons de croire et d’espérer (Cf.1P 3, 15). Jésus vient avertir les apôtres de vivre une foi consciente. De ne pas rester dans l’abstraction au vécu de la foi.  La foi qui est imprimée en nous est suffisante pour marcher ensemble dans les jours sombres et de festivités.

4- « Augmente notre foi » s’explique à nous si Tim Hortons peut augmenter la dimension des croissants ou de la limonade; eh bien, Jésus peut surdimensionner notre foi. Pourtant, Jésus nous apprend que la foi ne nous est pas donnée sous forme de paquet pour être dépensée en monnaie d’échange dans nos relations avec lui. La foi n’est pas mesurée en fonction de la difficulté, de la tâche ou du travail qui nous attendent. Cette confiance nous met en relation d’amour pour recevoir la vie de l’autre et donner notre vie à l’autre, tel qu’il se fait dans les épousailles des couples. Cet autre est Jésus le Christ.

5-Les apôtres se voyaient en petit nombre pour accomplir la mission pertinente d’évangélisation du monde pour laquelle ils disaient : « Augmentez notre foi ». Là où les apôtres voient la quantité, Jésus voit la qualité. Le nombre n’est pas important pour Jésus, l’essentiel, c’est la qualité de notre foi et notre disponibilité à sa mission. Là où les apôtres demandent d’augmenter leur foi, ici nous pourrions demander à jésus d’augmenter les personnes qui viennent à l’église. Ce n’est pas le nombre qui compte, l’important, c’est que nous soyons des hommes et des femmes de prière, fidèles à la mission et l’Esprit Saint fera le reste. Car c’est l’Esprit qui convertit les gens. Par rapport à la quantité de foi, on raconte une histoire apparemment vraie de Jésus qui était une fois debout sur une montagne avec un disciple. De là, ils voyaient de loin 12 lumières dans une ville. Le disciple demandait à Jésus comment il peut y voir seulement 12 lumières dans une si grande ville. Jésus lui dit : « Ce sont les douze apôtres qui éclairent la cité. »  Comme Bernard Bro l’a dit, l’Église a toujours été représentée en petit nombre. Mais ce petit nombre est sel et lumière du monde (Mt 5, 13), il est levain qui fait lever la pâte de l’humanité.

6-Parfois, il y a des jours comme le petit garçon où nous nous sentons impuissants, perdus et ne savons pas comment aller de l’avant. Par la foi, nous nous asseyons en silence et attendons. La foi, c’est écouter, comme dit le refrain du psaume : « Aujourd’hui, ne fermons pas notre cœur, mais écoutons la voix du Seigneur. » La foi, c’est marcher ensemble à la lumière du synode.  C’est notre façon de voir les autres et le monde ; le critère par lequel nous agissons et parlons. Et l’évangile d’aujourd’hui est un évangile de fidélité. Une fidélité qui fait crier le prophète Habacuc dans la première lecture : « Combien de temps, Seigneur, vais-je appeler, sans que tu entendes? » Mais le juste vivra par sa fidélité. En exil, le peuple d’Israël était fidèle. Il a gardé sa fidélité à Dieu jusqu’à son retour à Jérusalem. La foi ne change pas notre passé, elle ne nous donne pas la garantie d’une vie facile, d’un futur meilleur ou sans souffrance. Elle nous dit tout simplement : « N’ayez pas peur, et que, peu importe où nous allons, quelles que soient les circonstances auxquelles nous sommes confrontés, nous le faisons en relation avec celui qui nous a créés, nous aime et nous soutient.

7- Enfin, Jésus n’a pas fait l’augmentation de la foi une priorité, nous en avons déjà assez. Saint Paul écrit à Timothée dans la deuxième lecture : « Garde le dépôt de la foi dans toute sa beauté, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous. »  

L’essentiel, comment vivons-nous la foi que nous avons? Comment notre foi, notre relation avec Jésus change-t-elle notre vie, celle des autres? La graine de moutarde de la foi est déjà plantée en nous. Elle est symbole de bonne chance dans certaines cultures. C’est un cadeau précieux que l’on fait à ceux qu’on aime. La graine de moutarde, c’est le Christ lui-même. Il ne nous a rien caché. Nous n’avons pas besoin de plus de foi. Nous avons besoin de plus de réponse à la foi, au Christ, à la graine de moutarde, à la relation que nous avons déjà.

Fritznel Mertyl, première homélie à la chapelle du CRS et à la cathédrale Saint-Jean-l ’Évangéliste